Il y a deux hommes en l’homme.
Le premier est tourné vers le haut, le deuxième vers le bas.
Le premier est orienté vers l’extérieur, le deuxième vers l’intérieur.
Le premier est trait, le deuxième est rond.
Le premier est actif, le deuxième passif.
Le premier pense à de grandes choses, le deuxième voit petit.
Le premier aspire à s’élever, le deuxième veut se réfugier.
Le premier se projette, le deuxième s’enferme.
Le premier craint l’immobilisme, le deuxième le changement.
Le premier est dérive, le deuxième est maîtrise.
Le premier fonce vers la mort, le deuxième tente de rester nouveau né.
Le premier ambitionne les hauteurs, le deuxième se contente des petitesses.
Le premier est violence, le deuxième résistance.
Ces deux hommes font l’homme.
Il y deux êtres incomplets dans l’homme.
Le premier ne parvient jamais au but fixé. Ses ambitions ne sont jamais assouvies. Il subit la frustration.
Le deuxième ne se détache jamais du monde. Il est arrêté aux portes de son refuge. Il reste soumission.
Ces deux être forment la contradiction primaire de l’homme, le moteur de son existence.
Nous appellerons ce premier être le soi-monde et ce deuxième le monde-soi.
Le bonheur est exclusif
Le bonheur ne se cherche pas, il se trouve. Le bonheur ne dure pas, il est simplement la somme de moments d’existence plus « complets » que tous les autres. Le bonheur se vit quand il éclipse le reste.
Celui qui oublie son être résistant monde-soi vit dans le déni de soi. Il incarne l’action pure mais jamais terminée. Une fuite en avant.
Celui qui oublie son être violent soi-monde vit dans le déni du monde. Il incarne la passivité pure mais sans enjeux. Une mort née.
Ces deux états peuvent permettre le bonheur. Un bonheur complet dans sa sphère, exclusif et entier.
La sagesse est orgueilleuse
La sagesse est une tentative de se rendre accessible au bonheur. C’est une approche parmi d’autres et personne ne penserait qu’elle est plus propice qu’autre chose.
La sagesse est avant tout un état d’acceptation, de soi et du monde. L’affirmation assumée d’une contradiction profonde. Contradiction qui écartèle entre la violence et la résistance.
La sagesse refuse ces deux bonheurs pour un autre plus bancal. Celui de mesurer à chaque instant sa contradiction interne. La lutte intestinale entre deux soi asymétriques.
La sagesse est un état d’observation de soi. La sagesse est l’orgueil suprême. Elle veut rire de sa condition contradictoire. Elle est la tentative de bonheur de ceux qui croient se connaître.
Le bonheur accessible par la sagesse est intermédiaire et incomplet.