Classe de terminale, cours de philosophie.. La prof lance, vindicative : « si vous saviez mourir demain, feriez vous la même chose aujourd’hui ? ». Protestations véhémentes de la foule : « ah bah non alors ! », commentaires sarcastiques du plaisantin de service : « en tout cas, je ne serai surement pas en cours de philo ».
Toujours incroyable de se rendre compte des années après comme certains événements/moments/instants anodins ressurgissent et dévoilent ainsi l’impact qu’ils ont pu avoir sur ma vision des choses. Cette petite phrase, brandie à la face de la classe par une enseignante qui désespérait de réveiller et faire réagir son troupeau d’élèves, a fait depuis son petit bonhomme de chemin dans mon esprit.
Sur le moment les arguments manquaient pour tenter d’expliquer à la prof, volontairement naïve, qu’on ne peut pas vivre en se persuadant qu’il n’y aura pas de surlendemain. Pourtant cette question m’amenait sur m’interroger sur la conscience à avoir de la mort : nier son caractère imprévisible et donc potentiellement très proche me semblait le meilleur moyen de mal conduire sa vie.
Pendant des années, à partir de ce moment, je me suis couché en faisant l’effort de me rappeler que ma mort surviendrait peut-être d’ici mon réveil, ou (plus optimiste) d’ici ma prochaine nuit. Exercice surprenant mais que je me surprend à recommencer de temps à autre, lorsque j’ai l’impression que le sens de ma vie m’échappe…